LA BRUYERE
En ce temps -là,sainte Anne se promenait
sur la lande bretonne.Soudain,lasse, elle s'assit
sur un rocher.A ses pieds venait mourir l'écume blanche
Eblouie par l'ardente réverbération des flots,
la mère de la vierge reporta son regard
sur la lande dénudée.
*Mon Dieu ,se dit sainte Anne,où porter les yeux?Ici c'est un éclat insoutenable,
là une campagne désolée.
Alors,en un murmure,la terre parla.
*Sainte Patronne,dit-elle,pourquoi
sommes nous si dépourvus?
Alentour, sur la terre de France,
vois cette richesse,ces fleurs,ces vignes,
ces champs diaprés.
Je ne demande ni corolle fragile,ni grappe
juteuse que le souffle marin abîmerait.
Mais ne pourrais-tu trouver quelque chose,
ô sainte Patronne?
Pensive,Anne médita quelques secondes.
*Une fleur qui n'en soit pas une et qui,
pourtant, en aurait l'air?
Puis elle partit en souriant,
sa longue traîne caressant le sol aride.
Le lendemain,quand l'aube se leva,
la lande bretonne se drapait de rose et de blanc
La bruyère était née
Arlette de Pitray
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